jeudi 14 août 2008

Vivement le vouvoiement!

Samedi, toute la famille est passée chez le coiffeur. Notre coiffeuse, une Française récemment immigrée, à l’emploi d’un Français immigré de plus longe date, nous a parlé de sa relation difficile avec le tutoiement depuis qu’elle est au Québec. Elle vouvoie son patron, même si elle tutoie sa femme, une proche amie. Elle suit des cours où le prof, Mélissa, lui a demandé de la tutoyer; lorsqu’elle a poussé la familiarité jusqu’à l’appeler « Mel », elle s’est fait corriger. Retour au vouvoiement, qu’elle trouve plus confortable. Elle vouvoie tous ses clients, sauf les enfants.

Il est d’ailleurs intéressant d’observer, lors des activités de l’Ordre, qui a tendance à vouvoyer et qui à tutoyer. En fait, c’est un des milieux que je connaisse où on se vouvoie le plus, ce qui m’a fait reprendre l’habitude de le faire. Beaucoup de gens semblent trouver cela loufoque, surtout les jeunes qui me servent dans un magasin, par exemple. Mais j’aime bien marquer ainsi une différence entre la sphère publique et la sphère privée. Et puis avec les gens qu’on vouvoie par respect, le passage au tutoiement marque une évolution dans la relation, ce qui n’est pas sans plaire.

Voici un article intéressant à propos du vouvoiement en entreprise. J’aime particulièrement ce passage :
Cette rupture s’est combinée avec un mode de management d’entreprise inspiré du monde anglo-saxon, précise Jean-Pierre Le Goff. On y vante la proximité, le challenge collectif. Tous les salariés sont mis sur le même plan d’implication. Dans l’imaginaire, tous sont censés devenir autonomes et responsables…

« Dans l’imaginaire » : c’est la difficulté que j’ai souvent à traduire les textes de motivation du personnel. Si l’idéal recherché de collaboration d’égal à égal ne cadre pas du tout avec la véritable structure hiérarchique de l’entreprise, on cherche à faire de l’équipe une « gang de chums » où les pairs servent à la fois de soutien et de surveillant. Autrement dit, il y a brouillage de la hiérarchie afin d’imposer une internalisation des principes de contrôle (me faudrait relire Foucault, tiens).

Ce brouillage est facilement exploitable en anglais, où la langue n’a pas ce marqueur qu’est le français. Nous somms chanceux d’avoir, dans la langue de Molière, ce moyen de démarquer plus clairement les sphères professionnelle et personnelle.

Alors vouvoyons sans hésiter, c’est pour notre propre bien!

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